Fév 20, 2011
Fil – Actualité poétique (20/02/2011)
Andrée Chedid (France) / Sherman Alexie (USA) / Portrait de Paul Eluard par Salvador Dalí / Thuy Toàn (Vietnam) / Pete(r) Doherty (Angleterre) / Jean-Claude Pirotte (Belgique) / Dante / Poésie et culture (France) / Victor Hugo / Charles Coypeau Dassoucy (France) / Rilke (Autriche) / Anthologie Poètes de l’Imaginaire / Hosheng Broka (Syrie) / Ernest Pignon-Ernest (France) / Anthologie (Argentine).
« Vivre en poésie, ce n’est pas renoncer : c’est se garder à la lisière de l’apparent et du réel… » (Andrée Chedid) – D’origine chrétienne libanaise, née au Caire en 1920, la poétesse Andrée Chedid est morte à Paris le 6 février. Auteur prolifique, elle publia en 1943 son premier recueil, en anglais. Pointons ici Au cœur du cœur, paru en 2010 dans la collection de poche « Librio » (EJL, Paris), un choix de poèmes s’étalant de 1949 à nos jours. Respectivement mère et grand-mère des chanteurs Louis et Matthieu Chedid, alias « M », elle était lauréate de nombreux prix, dont la Bourse Goncourt de la Poésie 2002 pour l’ensemble de son oeuvre, et fut faite grand officier de la Légion d’honneur en 2009. En ouverture à la présentation de l’édition 2011 du « Printemps des Poètes », le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, a rendu hommage à Andrée Chedid en citant des vers extraits de son poème Saison des Hommes.
Danses de guerre (USA) – Le romancier et poète d’origine amérindienne Sherman Alexie, né en 1966, voit son dernier recueil de poèmes et de nouvelles courtes traduit de l’américain et paraître chez Albin Michel (collection « Terres d’Amérique »). Une exploration des relations humaines couronnée par le prix Pen-Faulkner 2010.
Portrait de Paul Eluard par Salvador Dalí – Eté 1929, Paul Eluard, accompagné de son épouse, rend visite à Dali à Cadaqués (Catalogne). On le sait, Gala quitta le poète pour le peintre… Un tableau représentant Eluard, ayant appartenu à un collectionneur hongrois vivant à Paris, a été mis aux enchères chez Sothebys, à Londres, estimé à 4 millions d’Euros. Le surréalisme n’a pas de prix et c’est un nouveau record pour une œuvre du maître du genre : adjugé pour l’équivalent de 15,8 millions d’Euros !
Thuy Toàn (Vietnam) – Le septuagénaire Thuy Toàn a reçu l’Ordre de l’Amitié de la Fédération de Russie, des mains du président Dmitri Medvedev. Traducteur de poèmes russes, notamment ceux de Pouchkine, en vietnamien depuis plus de 50 ans, il est à l’origine d’une dizaine de recueils destinés à faire découvrir la poésie russe à ses compatriotes. Parti étudier à Moscou à l’âge de 16 ans, il est diplômé en 1961 de la Faculté de littératures et de langues de l’École normale supérieure Lénine : « les poèmes que j’ai traduits convenaient non seulement à mon état d’âme mais aussi à celui de la jeunesse de cette époque, ce sont des poèmes d’amour, des vers de fervents révolutionnaires, des patriotes aspirant à la liberté… », a déclaré Thuy Toàn à l’Agence vietnamienne d’information (AVI). Peu après la dissolution de l’URSS en 1991, il a sorti un recueil de poèmes Je dois parler de la Russie, publié à compte d’auteur. En 2005, son autre recueil Les étoiles filantes a été primé par l’Association des écrivains vietnamiens. L’année suivante, il publiait Cent poèmes d’amour. En 2007, Thuy Toàn a organisé une série d’événements dont une soirée baptisée « Cinquante ans de poésie russe au Vietnam ».
« Poète, jeune et occupé, cherche chambre spacieuse à bas prix quelque part. Excellentes références disponibles… » (Angleterre) – Sortis en 2007 outre-Manche, la vingtaine de carnets intimes (pensées, poèmes, récits) du rockeur anglais Pete(r) Doherty est disponible en français aux éditions Florent Massot (Paris). Couvrant la période 1999-2007, Les Carnets d’Albion comportent de nombreuses illustrations et des collages. Lecteur assidu de Baudelaire, Rimbaud, Huysmans, Wilde ou encore Blake, celui qui allait devenir « le plus scandaleux des chanteurs britanniques » donna des lectures de poésie dans les bars à ses débuts…
Jean-Claude Pirotte (Belgique) – Les lecteurs du mensuel Lire apprécient la chronique Journal d’un poète, tenue par Jean-Claude Pirotte. Rappelons qu’il a publié son seizième recueil de poésie, Autres séjours, aux éditions Le Temps qu’il fait (Cognac, France).
Dante (Italie) – Dante Alighieri a composé La Divine Comédie, un poème monumental en 100 chants, totalisant 14.233 vers, entre 1307 et 1321 (l’année du début de la rédaction varie d’un expert à l’autre). La traduction française de référence est due à la poétesse Jacqueline Risset, spécialiste du sujet, qui vit et enseigne à Rome. Une nouvelle édition, en 656 pages, de l’œuvre fondatrice de la poésie italienne est parue chez Flammarion (collection « GF »).
Poésie et culture (France) – L’hebdomadaire Télérama n°3186 (5-11 février 2011) cite le sociologue Bernard Lahire : « Faut-il ne juger qu’à sa force de vente ou de diffusion immédiate la vivacité d’une culture ? La vraie question est : quel type de culture veut-on soutenir et promouvoir ? Faut-il aider la poésie à continuer d’exister ou fabriquer des Marc Levy pour concurrencer le marché américain ? Le protectionnisme des quotas est un aveu d’échec. C’est par l’éducation et de vastes ambitions culturelles d’Etat que l’on pourra le mieux soutenir les formes culturelles les plus exigeantes. »
« Un instant de poésie » – La page 100 du n°34 (janvier/février 2011) de Gloire & Empire, revue de l’histoire napoléonienne, reproduit un extrait de Lui, poème de Victor Hugo saluant Napoléon Ier, publié dans le recueil Les Orientales, en 1829.
Dassoucy & les garçons (France) – Le Magazine des Livres n°28 (janvier/février 2011) offre un large extrait de la nouvelle biographie (Fayard) de Jean-Luc Hennig, auteur d’une autre en 2003 sur le poète latin Martial, consacrée à Charles Coypeau Dassoucy (1605-1677). Musicien et poète de la cour de Louis XIII, puis évoluant dans l’entourage de Mazarin et du jeune Louis XIV (qui, paraît-il, s’amusait beaucoup en lisant ses vers), amant de Cyrano de Bergerac, ami de Molière, ce « libertin burlesque » fut un grand voyageur et fréquenta à plusieurs reprises les prisons…
Lettres d’un jeune poète à sa mère (Rilke) – Dans le n°69 (février-mars 2011) de la revue Clés, André Comte-Sponville manifeste son admiration (« j’aurais aimé être son amant ») pour Etty Hillesum, jeune Néerlandaise ayant travaillé dans les services administratifs du Conseil juif d’Amsterdam jusqu’à sa déportation à Auschwitz, où elle mourut fin 1943. Son journal, tenu à partir de 1941, a été publié sous le titre Une vie bouleversée (Seuil, collection « Points »). Nous apprenons ainsi qu’Etty Hillesum vouait « un culte » au poète autrichien Rainer Maria Rilke, né en 1875… Or, le mensuel Books (n°19, février 2011) se fait l’écho de la considérable correspondance, inédite jusqu’à une époque récente, échangée entre Rilke et sa mère, Sophie (« Phia »), de 1896 à 1926, année du décès du poète. Un précieux témoignage sur la vie quotidienne de Rilke, édité chez Insel Verlag (Berlin)
« (…) la poésie en tant que genre n’est pas censée entrer en relation avec la catégorie esthétique du fantastique. » (France) – Plus d’une centaine d’auteurs, poètes connus (Baudelaire, Hugo, Nerval, Verhaeren, Verlaine,…) et moins connus, d’expression française des 19ème et début du 20ème siècles, sont rassemblés dans l’anthologie Poètes de l’Imaginaire : fantastique, fantasy et science-fiction. Des textes réunis par Sylvain Fontaine pour former un volume de 680 pages, publié chez Terre de Brume (Dinan, Bretagne), dans la collection « Littératures »
Hosheng Broka (Syrie) – Que de commentaires sur le « printemps arabe » ! Le poète kurde syrien Hosheng Broka s’est confié sur le site Internet Elaph, hébergé à Londres. Des extraits ont été traduits en français pour le n°1058 (10-16 février 2011) du Courrier International : « (…) Dès son serment d’investiture en juillet 2000, Bachar El-Assad avait philosophé sur « l’urgente nécessité d’une nouvelle pensée créatrice » (…). Depuis la mort d’Assad Ier, c’est une décennie de perdue. La Syrie est allée de mal en pis. L’état d’urgence est toujours en vigueur – depuis 1963 – et la répression, la terreur d’Etat, les restrictions des libertés et le combat contre toutes les opinions divergentes et contraires aux intérêts du régime n’ont fait qu’empirer. Les cachots sont pleins de la fine fleur du pays. (…) Certaines [organisations internationales des droits de l’homme] estiment à 17.000 le nombre cumulé des personnes disparues en trente années de dictature. (…) Réveille-toi, Bachar ! Tu as raté le train de la réforme, comme Zine El-Abidine Ben Ali et Hosni Moubarak. »
« (…) le dessin qui doit à la fois transformer le lieu en espace plastique, en travailler la symbolique, en exacerber les potentiels poétiques. » (France) – Ernest Pignon-Ernest, artiste plasticien (collages en papier journal) dont l’œuvre est commentée par 50 personnalités dans Face aux murs (éditions Delpire, Paris), s’est exprimé dans Le Monde Magazine n°73 du 5 février 2011 : « J’étais obsédé par l’idée de rendre, actuelle, vivante, son image. Mais je savais que ce serait le nier que de le figer dans un portrait classique. Vous imaginez un Rimbaud en marbre ? Le papier, la sérigraphie, la multiplicité des images en même temps que leur destruction prévisible m’ont permis de faire apparaître, en situation, le poète fulgurant aux semelles de vent. J’ai collé des centaines de ses portraits à Charleville, à Paris, et sur les routes… Parce que c’était un merveilleux vagabond. Et ce qu’il y avait de plus rimbaldien dans mon histoire, c’était la fragilité de l’image. (…) L’image du poète Mahmoud Darwich, chez lui, en Palestine. D’habitude, je colle seul, en pleine nuit. Mais là, tout le monde s’en mêlait. A Ramallah, Naplouse, Bethléem. Je collais son image et des extraits de ses poèmes, choisis en fonction des lieux : un marché, un check point, et aussi le fameux « mur » qu’il appelait « le serpent ». Les passants applaudissaient car il incarne leur histoire. Et les enfants récitaient ses poèmes tandis que je collais. »
« Dans la patrie d’Alfonsina Storni et de Jorge Luís Borges, la poésie – la littérature – est comme le football : on soupçonne qu’au moins la moitié de la population la pratique. » (Argentine) – Sous la direction du poète équatorien Mario Campaña, les Ediciones B (Barcelone) viennent de sortir une Anthologie de la poésie argentine d’aujourd’hui (Antología de poesía argentina de hoy). En près de 300 pages, un bon panorama en remontant jusqu’aux années 1950, avec 23 auteurs, dont Alejandra Pizarnik (pour le plus grand bonheur de Mélanie Godin…).